Lutte biologique : les parasites font mouches.
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Il n’y a pas un pays de la zone océan Indien qui ne soit pas concerné. Les mouches des fruits sont partout. A La Réunion, Bactrocera dorsalis manquait à l’appel jusqu’à récemment. Sa présence n’y fait plus aucun doute. Son introduction complique la tâche des agriculteurs qui cultivent des fruits et légumes dans l’île. Ces insectes pondent dedans. Alors que la mangue représente la deuxième part la plus importante des cultures agricoles de La Réunion, c’est tout un pan de l’économie locale qui est atteint.
Une lutte s’organise
Au sein du projet Epibio-OI, des chercheurs se regroupent pour étudier les mouches des fruits, et trouver un moyen biologique de lutter. Pierre-François Duyck du Cirad à La Réunion et Issa Mze Hassani de l’Inrape aux Comores ont peut-être trouvé la solution. Avec Fopius arisanus, un parasitoïde, c’est-à-dire un insecte qui parasite les œufs des mouches des fruits, les scientifiques espèrent mener une lutte biologique. En l’introduisant là où les mouches des fruits pullulent et agressent les cultures fruitières et légumières, le parasitoïde pourrait réguler leur population. « Spécifique aux mouches des fruits, Fopius arisanus dépend de certaines espèces, et ne peut pas vivre sans elles. En réduisant les populations des mouches des fruits, les populations du parasitoïde baisseraient forcément aussi. C’est pratique, il y a un principe de mutualisme qui implique qu’elles s’auto-régulent » explique Jim Payet, un technicien du Cirad qui élève Fopius Arisanus.
Les deux entomologistes sont arrivés à cette conclusion après des études aux Comores. Pour confirmer leur hypothèse, des tests sont effectués sur le terrain dans les différentes îles de l’archipel avec des lâchers de Fopius Arisanus. Ils font le suivi des populations des mouches des fruits et observent leur interaction avec le parasitoïde. « Ces études permettent aussi de déterminer quelles sont les plantes hôtes des mouches des fruits aux Comores. Ça va permettre de savoir comment gérer ce phénomène, de savoir quelles plantes éviter afin de réduire les sources de multiplication des espèces exotiques » précise Issa Mze Hassani. « On a pu montrer que la dynamique de population des mouches des fruits suivait la fluctuation des mangues et des bananiers » ajoute Pierre François Duyck.
A généraliser dans les autres îles
L’espoir à long terme des centres de recherche en agronomie serait de pouvoir généraliser ces méthodes de lutte aux autres îles. Madagascar qui est gravement touchée par les invasions de mouches des fruits finance des études menées conjointement avec le Cirad dans le cadre du projet Epibio-OI. Le but est de réguler les populations envahissantes en « proposant des moyens de luttes adéquats pour venir à bout de ces dégâts énormes » précise Harisoa Nirina Razakamanana la chef du service de surveillance phytosanitaire à la direction de la protection des végétaux au ministère de l’agriculture. Henriette Rasolofoarivao de l’université d’Antananarivo étudie sur le terrain le développement des mouches des fruits. Elle photographie toutes les espèces hôtes afin de les compiler dans un ouvrage et d’actualiser les connaissances sur la présence des espèces de mouches des fruits dans l’île. « C’est un préalable pour établir les moyens de lutte » explique la chercheuse malgache, car les parasitoïdes doivent être spécifiques à certaines sous-espèces.