Le Rubus régresse !
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Elle s’étale. Rampe. Et progressivement, si on la laisse faire, gagne du terrain, jusqu’à étouffer la végétation qui l’entoure. Cette conquérante, c’est la vigne marronne. Une ronce que les scientifiques appellent le Rubus alceifolius. Une espèce envahissante dont la forte tendance à se propager menace la biodiversité de La Réunion.
Quand elle prend ses aises, elle ne laisse plus de place aux autres. Ses voisines suffoquent, laissant les plantes endémiques, c’est à dire propres à La Réunion, mourir. Cette menace entraîne des extinctions d’espèces.
Cela peut être le cas dans certaines zones de la forêt de Mare Longue, l’un des ultimes vestiges de la forêt tropicale humide de basse altitude, dans le sud de l’île.
Mais la végétation endémique n’a pas dit son dernier mot, et la nature ne se laisse pas faire, aidée par quelques experts en écologie.
Des scientifiques du CIRAD (Centre de coopération international en recherche agronomique pour le développement), de l’Université de La Réunion, et des agents du Parc national de La Réunion y étudient le développement de la vigne marronne et recensent les secteurs concernés. Depuis 2009 une équipe pilotée par le CIRAD cherche à savoir si la ronce gagne du terrain, et si les autres plantes résistent. Les premiers résultats parlent.
Une plante à l’assaut de nos forêts
Ces résultats sont le fruit de vingt années d’études. En 1997, le premier programme de recherche coordonné par l’ONF démarre sur la lutte biologique contre la vigne marronne à La Réunion. Il s’agit de trouver un organisme vivant capable de combattre cette peste végétale, sans avoir recours aux procédés chimiques néfastes à l’environnement. Il faut aussi que ce nouveau venu ne soit pas une menace pour des espèces endémiques et ne devienne pas à son tour une espèce envahissante.
Cibdela janthina, communément appelée la mouche bleue, est choisie pour être cet agent de lutte biologique. Après dix ans de recherche, l’insecte arrivé d’Asie du sud-est est lâché en 2007 sous tunnel, puis en milieu naturel. Il aurait mis plus d’un an à faire le tour de l’île, et serait observé une première fois en 2009 à Mare Longue. Depuis cette tenthrède n’a jamais cessé de prouver son efficacité contre le Rubus alceifolius.
Des victoires contre le Rubus
Les chercheurs ont donc trouvé un moyen de combattre le raisin marron dans la forêt. Les statistiques sont sans ambiguïté, depuis l’introduction des Cibdela Janthina, alias la mouche bleue, la vigne marronne ne progresse plus, en particulier en basse altitude. Sur 98 trouées échantillonnées de 2009 à 2017, seules 22 trouées en altitude subissent une progression de la vigne marronne. Dans 66 trouées au contraire le Rubus recule, et 10 trouées n’éprouvent aucun changement. Selon Jean-Marie Pausé du Parc national, « la cicatrisation de la forêt se passe bien ».