La vanille Bourbon, entre agriculture et patrimoine
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Emblématique, la vanille n'occupe pourtant qu'une place minime dans les statistiques agricoles de l'île de la Réunion. En un siècle, la filière vanille de l'île Bourbon est passée de leader mondial à culture "patrimoniale". Aujourd'hui, entre agriculture et patrimoine, cette production identitaire de la Réunion peut offrir des opportunités de diversification avec une meilleure maîtrise technique et une valorisation du produit.
Une histoire de crises
Leader sur le marché mondial au XIXème siècle, la filière vanille de l'île bourbon traverse ensuite une série de crises reléguant aujourd'hui cette culture au rang de "patrimoniale". Les années 1930 sonnent le glas de l'heure de gloire de la vanille réunionnaise, avec l'apparition de pays producteurs plus compétitifs, comme Madagascar.
La filière réunionnaise devra aussi faire face à partir des années 1980 à des difficultés dans la gestion des structures privées et des coopératives. Moins rentable, la production de vanille laisse place progressivement à d'autres cultures. Certains producteurs continuent néanmoins une production qui devient plus familiale, par attachement à la culture. La production de vanille à la Réunion passe ainsi en quelques dizaines d'années d'une production intensive à une culture dite "patrimoniale".
La vanille, une place complexe sur le territoire
La production de vanille à la Réunion est devenue marginale avec 0,4% des surfaces cultivées selon le dernier RGA. 1,4% des exploitations de l'île déclarent cultiver de la vanille, confirmant la baisse inéluctable de la production depuis des décennies. Au delà des statistiques, la vanille garde pourtant une grande place dans le coeur des réunionnais et des consommateurs, qui, selon des enquêtes, associent la vanille à un savoir faire local. Selon Camille Demené, doctorante au Cirad à la Réunion, "lorsque l'on interroge certains acteurs de l'agriculture, les collectivités locales, les consommateurs, etc, il apparait que la vanille a une place plus complexe sur le territoire que les indicateurs chiffrés ne le laissent penser. D'où l'intérêt d'étudier les dimensions culturelles, touristiques et environnementales de la filière".
Valoriser d'avantage
Aujourd'hui, la vanille Bourbon reste un emblème patrimonial de l'île, un statut qui mérite bien que l'on s'y attache. Pour valoriser ce produit et mieux maîtriser sa production, plusieurs scénarios sont possibles et combinables :
- Augmenter la productivité par des systèmes de production plus intensif. C'est le cas aujourd'hui des ombrières. Mais ce système a ses avantages et ses défauts : certains producteurs militent pour la valorisation du mode de production en sous bois, plus traditionnel. Les ombrières exigent en effet une maîtrise technique importante. Elle gommerait par ailleurs la diversité des profils aromatiques que l'on rencontre actuellement au sein de la production réunionnaise (un projet de recherche est en cours sur l'identification de terroirs).
- Augmenter la qualité et valoriser la vanille sur des marchés de niche. "Différentes démarches de labellisation ont été entreprises ou sont en cours : le dossier IGP a été déposé à l'INAO en 2008, une démarche autour de l'Agriculture Biologique a également été initiée au sein de la coopérative Provanille, et d'autres stratégies sont développées par les transformateurs privés, par exemple la participation à des concours (Salon de l'Agriculture) par la Vanilleraie. Autant de démarches qui ont pour vocation de distinguer la production réunionnaise ou de conforter sa position sur des marchés de niche plus rémunérateurs".
- Enfin, on peut imaginer une autre perspective autour de la valorisation de la fonction "environnementale" de la production de vanille en sous bois. Les planteurs contribuent dans certains cas particuliers à la lutte contre les espèces exotiques envahissantes, ou à la restauration écologique sur des parcelles gérées par l'ONF. La rémunération de ces pratiques pourrait entrer dans le cadre d'un dispositif de rémunération de type "MAE". Mais pour l'instant, les dispositifs existants (accessibles seulement aux agriculteurs déclarés à l'AMEXA) et le positionnement des acteurs (notamment les acteurs de la gestion de l'environnement, pour lesquels le rôle environnemental doit être évalué plus précisément), rend peu probable la réalisation de ce scénario à court terme.
Source : Note de conjoncture DAAF - avril 2012,
rédigée par Camille Demené
Remerciements : Camille Demené, doctorante au Cirad à la Réunion